• Olivier Todd “Camus, une vie”, Editions Gallimard et Olivier Todd, 1996

     

    CAMUS ET LA GUERRE D’ALGERIE

     

    L’Algérie n’est pas la France, elle n’est même pas l’Algérie, elle est cette terre ignorée, perdue au loin, avec ses indigènes incompréhensibles, ses soldats gênants et ses Français exotiques dans un brouillard de sang. Elle est l’absente dont le souvenir et l’abandon serrent le cœur de quelques-uns, et dont les autres veulent bien parler, mais à condition qu’elle se taise » (« l’Absente », éditorial de l’Express, 21 octobre 1955)

     

    Entretien avec Jean Daniel

    Aujourd’hui dit Camus, on nous parle de « nation algérienne » et cela m’exaspère…L’Algérie est un territoire habité par deux peuples, je dis bien deux peuples, l’un est musulman, l’autre ne l’est pas. Les deux peuples d’Algérie ont un droit égal à la justice, un droit égal à conserver leur patrie.

     

    Il n’y a pas lieu de se résigner ou de croire à une histoire qui serait juste. C’est le combat pour la justice qui importe. Dans cette perspective, la répression française n’a aucune justification et la violence des méthodes du Front de libération n’en a pas davantage.

     

    La trêve pour les  civils

    L’utopie de Camus . Un appel à toutes les forces présentes pour épargner les civils

     

    « Je prendrai la parole en même temps que les représentants des autres tendances ou autres confessions. Je ne suis pas le prophète de ce royaume en ruine »

     

    Camus se rend à Alger en janvier 1956. Il loge au Saint Georges. La préparation de son « meeting » est difficile car entravée par les autorités d’Alger et les manifestations hostiles à son égard.

    Il écrit pourtant à ses amis (Carnets III) « Cette angoisse que je traînais à Paris et qui concernait l’Algérie m’a quitté. Ici du moins on est dans la lutte, dure pour nous qui avons ici l’opinion publique contre nous. Mais c’est dans la lutte que finalement j’ai toujours trouvé ma paix.. le risque justifie la pensée. Et puis tout vaut mieux que cette France de la démission et de la méchanceté, ce marais où j’étouffe. Oui je me suis levé heureux, pour la première fois depuis des mois. Et j’ai retrouvé l’étoile »  

     Ce fut un échec. « L’appel de Camus débouche sur une impasse, un piège, une accumulation de malentendus, inconscients ou souhaités »…les clans vont s’homogénéiser et se combattre de plus en plus violemment et cruellement.

     
    Edmond Brua écrit dans le Journal d’Alger «  En dehors de toute position politique, Albert Camus a lancé hier un pathétique appel pour la protection des civils innocents.On veut croire que si les manifestants qui,massés sur la place du Gouvernement , poussaient des cris hostiles pendant qu’Albert Camus parlait  au Cercle du Progrès , devant une salle archicomble, avaient pu entendre ses paroles, ils auraient eu honte de leurs cris et auraient, avec l’assistance, longuement acclamé le grand écrivain, leur concitoyen »

     

    « Camus et ses amis paraissent coincés entre l’histoire et la morale, la répression et le terrorisme, et victime du principe commun aux extrémistes «  Qui n’est pas avec nous est contre nous ».

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